Un stage intensif de 40 jours pour faire le tour de soi-même

 

Quand on enseigne un outil de connaissance de soi comme l’Ennéagramme, on ne pense et ne vise qu’une chose : la transformation humaine, et la sienne en premier lieu. Pouvoir partager ce chemin avec d'autres, cependant, est un grand privilège, car avec ou sans l’Ennéagramme, elle reste un grand mystère. Elle s’accomplit chez les uns, se fait attendre chez les autres. Elle est le plus souvent lente ou imperceptible.

 

Une chose est sûre - peut-être que certains se posent encore la question - cette transformation ne se fera jamais sans nous. Ce qui veut dire en clair que notre pleine participation est nécessaire pour qu’elle puisse s’accomplir. Cette dernière commence par une prise de conscience, une décision. S’ensuit normalement une démarche sincère de connaissance de soi, premier pas incontournable.

 

Mais l’autre chose qu’il faut aussi savoir, et c’est un paradoxe, c’est que même si nos efforts sont absolument nécessaires, ils ne suffisent pas. Notre transformation ne se mérite pas, ne se gagne pas, ne s’achète pas. La petite Thérèse (1) avait bien compris cela et l'exprimait très simplement :

 

“tout est grâce”.

 

C’est scandaleux, n’est-ce pas, que tous nos efforts, quelqu’ils soient, ne suffisent pas! 

Et bien pas tant que cela…Si l’on réfléchit bien, il ne peut en être autrement. 

 

Avant l’émergence de la grande mode du “Développement Personnel” - dont les techniques tendent à nous faire oublier ce rôle de la grâce - c’était essentiellement les traditions spirituelles et religieuses qui offraient un chemin de "transformation".

 

En ce qui concerne la tradition chrétienne, on ne parle pas de transformation mais de chemin de conversion. On dit souvent qu’il s’agit d’un changement de direction…mais le sens étymologique du mot est beaucoup plus radical : il s’agit tout bonnement de revenir sur ses pas. 

 

Faire "demi-tour" ? Oui, exactement, et ce n’est pas une histoire de fou.

Ce qui est fou, en vérité, c’est de s’entêter dans son errance sans jamais faire "demi-tour". Combien d’entre nous, nous nous disons  “en souffrance”, “pas heureux”, dans une “impasse”, pris au piège d’une vie dénuée de sens et nous continuons quand même notre chemin ?

 

A chacun son errance : on s’aventure en suivant le bout de son nez, on croit être assez fort pour “sentir” les vents et trouver son chemin…et jour après jour de cette vie dans le vent, on se casse souvent le nez. 

 

Ainsi l’idée de faire "demi-tour", c’est qu’après le temps de l’errance, il est temps de se remettre en question et de rentrer “à la maison”, tout simplement. En termes chrétiens, on parle d’un retour vers le Père, la source de notre être et de l'Amour qui nous donne la vie.

 

L’histoire la plus célèbre dans l'Evangile de ce demi-tour radical, de ce retour à la maison après les plus folles aventures, c’est celle du fils prodigue. Ce jeune homme a demandé sa part d’héritage à son père pour partir de chez lui. Ayant dilapidé son bien en diverses débauches, il se retrouve dans une déchéance qui le force à rentrer chez lui. A son retour, il est accueilli comme un fils par son père: il est l’être cher et précieux enfin "retourné".

 

Certains voudraient ajouter un bémol à cette histoire en disant que ce n’est pas le “beau” repentir, qui a poussé ce fils à rentrer, mais la faim bête et méchante. Erreur ! Le repentir n’est pas du tout le sujet. Le sujet, c’est justement la grande faim, celle du vrai pain, dont on reste affamé tant que l’on est ignorant de sa vraie nature et de son origine.

 

Cette histoire symbolique dit l'essentiel, mais la sagesse chrétienne nous propose bien plus encore, avec une voie radicale pour ce "retournement" : une traversée du désert, à la suite du Christ, pendant 40 jours. C'est le carême.

 

Ce carême se présente comme un véritable stage intensif qui se décline en 3 axes bien calibrés. Un programme complet de "développement personnel" avant la lettre.

 

Alors en quoi consiste-t-il ?

 

La première chose qu’il faut savoir, c’est que carême, cela veut dire 40 jours…Personnes non motivées, s’abstenir ! De fait, on ne “retourne” pas un homme en un week-end, ni en deux (moi qui propose des week-ends de (trans)formation, je le sais bien).

 

Le carême, accessible à tous (aucune contre-indication connue), propose trois outils pour la conversion intérieure : la prière, l’aumône et le jeûne. On ne va pas faire ici un cours, mais il est bon de se rappeler combien ce programme concerne tout l’homme :

  • La prière : prier, c’est se décentrer de soi et tourner son coeur vers le Tout autre que soi, en l’occurence le feu de l’amour de Dieu : Agape, amour divin. Notre petit coeur replié sur lui-même qui se meurt de sa petitesse aspire à cet amour-là, car il est taillé pour. Encore faut-il qu’il se tourne vers lui. C’est la finalité de la prière : transformer le coeur pour qu'il reconnaisse le primat de Dieu.
  • L’aumône : il s'agit de laisser passer l'autre avant soi. Ce n’est pas intuitif, mais l’aumône est un bel exercice pour lutter contre notre réflexe du "moi d'abord" qui se préoccupe essentiellement de soi et de son lendemain. Partager ce que l’on a, se détacher de ses possessions, c’est se résoudre à tourner le dos à la peur de manquer, c’est traduire en actes sa confiance et son espérance. C’est faire descendre la tête dans le coeur pour que ce dernier prenne les commandes.
  • Le Jeûne : il s’agit ici de se libérer de ce qui nous asservit. Toute personne qui a essayé de contrôler ses désirs par la volonté sait de quoi on parle. Bien que l’on sache que cette ascèse est là pour nous libérer de ce qui nous enchaine, elle reste très difficile et demande un vrai travail intérieur.

Le coeur, le mental, le corps. Travailler en même temps ses trois centres, pendant 40 jours… C’est impossible, me direz-vous ? Trop difficile ? Nous sommes trop faibles ? Je ne suis pas en mesure de dire le contraire. Heureusement, comme vous, je me rappelle du premier au quarantième jour que “tout est grâce”. 

 

Et si ce programme impossible, déguisé en stage intensif, était justement taillé pour me faire prendre conscience que, livré à ma seule ressource, comme le fils prodigue, je ne maitrise pas grand chose de ma personne ? Et si cette prise de conscience de ma faiblesse et de mes fausses idées sur moi-même étaient le point de départ pour accueillir la possible grâce d’une transformation pour une vraie conversion ?


Peut-être que le carême, c’est simplement 40 jours pour abandonner ses illusions sur soi afin de préparer le chemin de la grâce, qui seule peut nous sauver.

 

La personne qui a pensé et testé ce programme exigeant adapté à l’homme du monde d’hier et d’aujourd’hui n’est autre que le Christ. Il connaissait l’homme mieux que personne. D'où d'ailleurs l'addition de ce conseil précieux :


« Que ton aumône, ta prière et ton jeûne restent dans le secret » Matthieu 6

 

40 jours, cela peut paraitre long, mais il faut au moins cela pour ébranler l’inertie de notre ego et de ses passions. Certains diront qu’un seul jour suffit pour savoir qu'il reste le grand gagnant. Faisons alors confiance à la tradition qui veut que l’on essaye et échoue 40 fois.

 

Hauts les coeurs et à la grâce de Dieu !

 

(1) Sainte Thérèse de Lisieux

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Annie (samedi, 25 février 2023 09:05)

    Bon et beau jour et grand merci pour vos écrits �
    Que la Grâce nous accompagne... notre part ? dire OUI...En conscience et de tout coeur
    Avec gratitude et foi joyeuse
    Annie