1. Rester éveillé

Dimanche 3 décembre 

Je viens d’envoyer ma candidature pour parler à la conférence Ennéagramme Europe à Amsterdam en mai 2018. Thème de la conférence :  « The wisdom of your true self ».

Etant nouvelle dans le circuit, je ne sais pas si mon dossier sera accepté. Qu’importe, j’assisterai avec joie à cette conférence tant le sujet me semble fondamental. Par ailleurs, réfléchir à ce thème m’a permis d’avancer et de préciser mon projet, de trouver où ma « niche » Ennéagramme se situe. Cette dernière résulte du constat suivant :

  1. Découvrir ce « vrai soi » qui est en nous, est le but de toute vie humaine. Cette découverte est la clé d’une deuxième naissance, d’un nouveau cheminement, éclairé par une lumière qui vient de l’intérieur. Tous ceux qui en ont fait l’experience savent qu’il y a « un avant et un après ».
  2. Toutes les traditions spirituelles et religieuses ont ce point commun qu’elles cherchent à amener l’homme à cette rencontre essentielle. Malheureusement, au lieu de boire à la source de ces sagesses, beaucoup, sans doute une écrasante majorité, considèrent cette eau « non-potable ». Les raisons en sont multiples, mais je pense que la plus simple est que l’homme d’aujourd’hui n’a tout bonnement plus les clés d’accès au labyrinthe de cette langue spirituelle. Quand on ne comprend pas, on rejette…et quoi de plus naturel? 
  3. Mon expérience est que l’Ennéagramme peut être une clé d’accès. Pourquoi l’Ennéagramme ? Parce qu’il décode l’essence de la nature humaine et faire ce chemin-là de descente dans les entrailles de notre « humanité », qu’on le veuille ou non, nous emmène droit à la vérité : au bout de ce chemin, au delà de toutes les images que l’on s’est construites, on tombe sur quelque chose d’inouï, quelque chose qui est en nous, mais qui n’est pas de nous : « the true self ». Très jolie expression à la mode pour nommer ce qu’en d’autres temps on aurait appelé notre « nature divine ».

Cela fait des décennies que l’on s’acharne à jeter le bébé avec l’eau du bain. L’eau du bain, soit, je vous la laisse. Mais le bébé…? Ne peut-on pas tenter quelque chose? Faire l’effort d’un nouveau regard?

C’est une aventure que je veux tenter. Ainsi chaque semaine, je vais utiliser ce que l’Ennéagramme (entre autres) m’a appris de l’expérience humaine pour comprendre et éclairer ces textes anciens que l’église continue de nous transmettre chaque semaine. Que l’on soit croyant ou non, on peut être curieux et avoir envie de creuser pour voir par soi-même ce qui s’y cache. Et si ces textes détenaient vraiment, comme ils le promettent, le secret de la vie en plénitude? Et s’ils donnaient des pistes pour ordonner en soi les pièces d’un puzzle infaisable?

Amoureuse des mots et de la vie qu’ils dévoilent, passionnée par le mystère de l’Homme, de Dieu, m’embarquer dans cette aventure est pour moi un passage obligé. Alors pas de temps à perdre! D’autant plus que dimanche dernier était le premier dimanche de l’Avent, soit donc aussi le début de la nouvelle année liturgique - comprenez nouveau cycle de lectures de la messe - celle consacrée à l'Evangile de Marc.

Nous allons donc tout simplement commencer, belle coincidence, par le premier évangile de cette année. Un évangile court, clair et sans appel.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 13,33-37.

Prenez garde, restez éveillés : car vous ne savez pas quand ce sera le moment. C’est comme un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et demandé au portier de veillerVeillez donc, car vous ne savez pas quand vient le maître de la maison, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin ; s’il arrive à l’improviste, il ne faudrait pas qu’il vous trouve endormis. Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! » 

Restez éveillés…Veillez donc….Veillez!

Il me semble que le message ne peut pas être plus clair, et le fait qu’il soit martelé ainsi pour débuter l’année n’est sans doute pas un hasard. Alors pourquoi cet appel à veiller? Pourquoi est-ce si important?

Le fait est que nous dormons. Toute personne avertie (entendez : qui a entamé un chemin de connaissance de soi) sait que sa structure psychique est constituée principalement de conditionnements, d’habitudes et d’automatismes, profondément ancrés et donc imperceptibles. Inutile de s’offusquer ou de s’en défendre, c’est ainsi que nous sommes faits...notre condition humaine en quelque sorte! Par conséquent, à moins de développer un état de vigilance particulier, la machine bien rodée qui est en nous mène la danse de notre vie, à notre insu. Nous sommes alors comme le somnambule qui, instant après instant, obéit à un mouvement de vie automatique. L’enjeu de cet évangile est donc entre autres de nous appeler à arrêter de vivre en dormant et à rejoindre le camp des vivants de l’instant présent, un état d’être finalement très rare…Oscar Wilde ne manquait pas de lucidité en écrivant ces mots : « Vivre est la chose la plus rare du monde, la plupart des gens ne font qu’exister».

Toutes les traditions spirituelles authentiques appellent à ce travail de pleine présence à soi. C’est un muscle qui se travaille. Cette pleine présence n’est jamais acquise, elle est le fruit d’une action, issue de notre volonté. Il faut donc décider et « veiller », en conscience, à débrancher le pilote automatique. 

Très difficile! Car ce pilote automatique est parfait dans son rôle, sans compter qu'il nous maintient dans notre zone de confort. Peut-être que savoir ce que cette vie mécanique nous coûte aide à réfléchir : c’est notre liberté d’être, notre aptitude à accueillir « en liberté » ce qui est, ici et maintenant, qui est sacrifiée pour notre « somnolence. Enorme sacrifice! 

Par ailleurs, de la même manière que la personne assoupie n’entend pas le facteur sonner, la personne qui est en pilote automatique n’est pas en mesure de « recevoir » et est réduite à vivre en vase clos. Recevoir le « maitre de la maison », c’est aussi recevoir ce qui ne vient pas de nous et qui, en nous, transforme notre expérience. Cela s’appelle, en langage chrétien, la grâce. Ainsi, ne pas « veiller », c’est aussi se priver de la grâce.

Ce que je trouve également intéressant, pour finir, est que le « maitre de la maison » laisse sa maison à ses serviteurs en leur donnant tous les pouvoirs. Magnifique définition de la liberté de l’homme. Un maitre, donc, qui ne cohabite qu'avec des serviteurs libres? On rentre là dans le territoire de la non-dualité ou deux opposés cohabitent sans se contredire…Vous serez d'accord avec moi que ce territoire nous est très inconfortable. Il demande en effet une gymnastique pour y entrer car c’est la pensée binaire qui est notre mode de pensée premier. Blanc ou noir, pas les deux à la fois…

Bonne semaine, bonne veille, bonne gymnastique.

Note : Ce texte m'a inspirée de cette façon et cela n'engage bien-sûr que moi. Si vous avez une autre inspiration, n'hésitez pas à partager. La lecture d'un évangile est toujours personnelle. Partageons!

 

Episode suivant :

2. Dimanche 10 décembre : Préparer le chemin…Parlez-vous javanais?

 

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