"Commence donc par te considérer toi-même. Évite de te disperser vers d'autres sujets en négligeant ta propre personne. A quoi te servirait de gagner le monde entier en étant seul à te perdre ? Quelle que soit l’étendue de ton savoir, il te manquerait toujours, pour atteindre à la plénitude de la sagesse, de te connaître toi-même. Une telle lacune serait-elle vraiment si importante ? Elle serait capitale, à mon avis.
Connaîtrais-tu tous les secrets de l'univers, et les contrées les plus lointaines de la terre, et les hauteurs du firmament, et les abîmes marins, si, dans le même temps, tu t’ignorais, tu me ferais penser à un constructeur qui voudrait bâtir sans fondations. Ce n’est pas un édifice qu’il obtiendrait, mais une ruine. Quoi que tu puisses accumuler hors de toi-même, cela ne résistera pas mieux qu’un tas de poussière exposé à tous les vents. Non il ne mérite pas le nom de savant, celui celui ne l’est pas de soi. Un vrai savant devra d’abord connaitre ce qu’il est et boire de son propre puits ! Que ta considération commence donc par s’appliquer à toi-même, et qu’elle ne s’en tienne pas là car c’est par toi aussi qu’elle doit finir." (1)
Ces paroles de sagesse, toujours très actuelles, remontent au XIIe siècle. Un moine de Clairvaux devient Pape en 1145 : Eugène III. Saint Bernard ne manque pas de continuer à enseigner son compagnon et lui adresse cette fameuse "Lettre au Pape".
(1) Saint Bernard, Conseils au Pape, II, 6
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