Pensée d’un jour de confinement - 1

 

Nous étions des humains accaparés, pressés, n’ayant le temps de rien…le virus nous oblige à devenir humains, pour de vrai, en vérité. Et devenir humain, nous découvrons que ce n’est pas si compliqué. Est-ce que c’est compliqué pour un lion d’être lion, pour un chat d’être chat?…Il n’y a que les hommes qui imaginent qu’être humain est compliqué et difficile.

 

Devenir humain consiste « tout simplement » à accéder à d’autres ressources que celles de nos petites habitudes conditionnées. La bonne nouvelle : nous n’avons rien à inventer car ces ressources sont complètement en nous et elles nous définissent même mieux que tout…Elles sont notre « être » même.

 

Il est vrai que « nos petites habitudes conditionnées » prennent beaucoup de place, et la nature ayant horreur du vide, toute la place qu’on veut bien leur laisser. Ce sont nos «fixations» mentales, émotionnelles, instinctives qui remplissent notre quotidien ordinaire, dès le réveil de nos petites journées ordinaires. Cela commence par dire non à la sonnerie du réveil et aux nuages qui se trouvent là quand on ouvre les rideaux, puis cela consiste à râler contre le grille-pain qui grille trop, à s’inquiéter du facteur qui n’est pas encore passé, à critiquer ce qu’on vient juste de ne pas faire assez bien, à douter de l’issue positive de notre projet du jour, à se fabriquer une opinion vite fait bien fait sur la question embarrassante du moment entendue à la radio, à anticiper une tonne de soucis, au cas où, à s’énerver pour un oui ou pour un non, à procrastiner les choses urgentes mais barbantes…Bref le quotidien humain dans toute sa grandeur !

 

Et c’est un tout petit virus qui vient nous rappeler que l’on peut vivre autrement, en accédant à d’autres ressources intérieures….c’est à dire autres que que la critique, la complainte, l’énervement, le doute, le renoncement, etc…

 

Ce petit virus invisible, qui peut être partout, agit comme le petit grain de sel qui change le goût d’un plat. Là il change tout simplement le goût de notre quotidien…et plus largement le goût des autres, le goût de la vie. Ce petit grain de sel, si vous le regardez de très près, et sans vous mentir, c’est la mort ( ! ) qui a retrouvé sa place dans notre paysage existentiel. Comme le dit joliment Etty Hillesum :

 

« La mort est là tout d'un coup, grande et simple et naturelle,

entrée dans ma vie presque sans bruit.

Elle y a désormais sa place et je la sais indissociable de la vie. »

 

La mort qui peut me toucher moi, mais aussi ceux que j’aime et la multitude des autres qui font partie de ma vie, de près ou de loin. La mort, on en fait un monstre à combattre, mais elle a cette qualité exceptionnelle de redonner de la vie à la vie, surtout quand cette dernière n’a souvent pas trop le goût de vie.

 

Ces ressources humaines, ce sont ces fameuses Qualités essentielles décrites, entre autres, par  l’Ennéagramme. On peut les dire avec des mots mais le mieux c’est d’en faire l’expérience. Chaque fois que vous vous sentez pleinement vivant, et donc par la force des choses, pleinement humain, c’est que vous faites l’expérience d’une de ces qualités. Observez alors ce qui est en vous à cet instant, le goût, la texture et la couleur de cet instant…et surtout profitez ! Car il est si bon d’être humain. En vérité, on est d'ailleurs né pour cela et pour rien de moins.

 

Etty Hillesum étant une championne en la matière, je vous renvoie à sa feuille de route.

 

La Haye, 26 mars 2020

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